Réseaux de Cologne

Bookmark and Share
Réseaux de Cologne
Google ? Mountain view. Facebook ? Palo Alto. eBay ? San Jose. Yahoo! ? Santa Clara. La longue liste des entreprises de la Silicon Valley nous porte à croire que le web, cette toile, n'est tisée qu'au sud de la baie de San Francisco. La concentration des corporations de l'Internet y est telle qu'on associe volontiers le web à la côte et au soleil californiens. Pourtant, le réseau des réseaux est bel et bien mondial. Et peut-être apprendra-t-on à associer Internet au Rhin, à une gigantesque cathédrale noire... et à la bière bien sûr.

Et au milieu coule le Rhin

Elle est difficile de donner un centre à l'Europe, espace multipolaire par nature. Pas même l'Union Européenne ne dispose d'une capitale unique. On ne peut ainsi parler d'un centre mais plutôt de centres. Cologne compte parmi eux.

Köln, en version original, est avec un million d'habitants la quatrième ville d'Allemagne et la métropole de l'ouest. Les grandes villes allemandes semblent en effet soigneusement disposées sur les points cardinaux : Berlin à l'est, Munich au sud et Hambourg au nord.
N'allez-pas croire que Cologne se satisfasse de rester au pied du podium. La ville est au cœur d'une des régions les plus densément peuplées en Europe et dans le monde. Düsseldorf, Bonn et le Ruhr gebiet (Essen, Dortmund, Duisburg et bien d'autres) sont à moins de 50 kilomètres. 16 millions de personnes sont à moins d'une heure de route, 60 millions en continuant deux heures de plus. Sans compter que le Thalys met la ville à quelques heures de Paris et Bruxelles. Bref, à Cologne, la banane bleue n'évoque pas un OGM.

Sous ce drôle de nom se cache en effet un espace géographique, l'épine dorsale européenne. Cette région court de Londres à la vallée du Po en suivant le Rhin dans son intégralité. Au sein de cette banane, se concentrent population, activités économiques et centres de décisions. Cologne n'en perd pas une miette.

Métropole Média et Multimédia

Cette position privilégiée a fait la richesse de la ville, à travers les foires (Messe en allemand) et autres activités mercantiles. Encore aujourd'hui deux millions de personnes s'y rendent chaque année pour parler commerce. Malgré tout, depuis les années 50, une nouvelle activité suscite enthousiasme et croissance : les médias. Tout a commencé en 1956 avec l'implantation de la chaine de télévision WRD, qui compte parmi les plus importantes chaines publiques d'Europe. Depuis, l'engouement pour Cologne ne s'est pas démenti. Ce sont aujourd'hui plus de 55 000 personnes qui travaillent dans l'industrie médiatique. Huit chaines de télévision et de nombreuses radios sont installées à Cologne, un tiers des programmes allemands y sont produits ainsi que plusieurs films chaque année.

Forte de ses 85 000 étudiants, Cologne a aussi su développer des formations venant soutenir son pôle médiatique. L'Institut d'Arts Médiatiques (KHM) et l'Ecole internationale du Film (IFS) se partagent la deuxième place du classement des universités dans le domaine créatif établi par le magazine Focus.

En 2001, l'industrie médiatique s'est définitivement ancrée à Cologne, allant jusqu'à en modifier la skyline jusqu'alors dominée par l'immense cathédrale. Du haut de ses 148 mètres, la KölnTurm est la pièce maitresse du nouveau quartier MediaPark. 250 entreprises de l'univers des médias, de la communication et des télécommunications ont choisi de s'y implanter.

Des médias, il n'y avait qu'un pas à franchir vers le multimédia. L'industrie du jeu vidéo a également choisi les bords du Rhin. Cologne est l'une des premières video games cities européenne, au même titre que Lyon par exemple. La tradition des foires est perpétuée avec la Gamescom, équivalent européen de l'incontournable E3 de Los Angeles.

L'Internet rhénan

Après s'être intéressée aux réseaux commerciaux, puis aux réseaux médiatiques, Cologne se tourne désormais vers le réseau des réseaux. A une heure au sud de la ville, une empire du Net a son siège. United Internet ne vous dit probablement rien, pourtant ce conglomérat réalise 1,6 milliards d'euros de chiffres d'affaires et emploient 4000 personnes dans le monde. Cela ne ferait pas de lui un des géants de la Valley (le CA de Google avoisine les 22 milliards de dollars) mais malgré tout un membre à part entière.

En Allemagne en tout cas, United Internet est partout : fournisseur d'accès à Internet, emails (GMX, 8 millions de boites emails, venu à la rescousse des adresses Caramail), portails d'information (web.de, dixième site allemand et deuxième portail), etc.
A l'étranger, c'est avant tout sa principale filiale, l'hébergeur 1&1, qui est connue. 1&1 se vante d'être le premier hébergeur de la planète. Difficile à vérifier mais l'entreprise est clairement un gros poisson avec ses 9 millions de clients et 70 000 serveurs. Cette prédominance de 1&1 a sans doute contribué à faire de Cologne, la capitale européenne de l'hébergement web. C'est à ce titre que s'y tient chaque année le Web Hosting Day, premier évènement de la planète dans ce domaine.

Un autre géant des télécommunications est installé non loin de Cologne. Deutsche Telekom, l'opérateur téléphonique historique allemand, a son siège à Bonn. Telekom, comme l'appellent les allemands, est le premier FAI d'Allemagne (et donc l'un des grands d'Europe) sous la marque T-Online.

Au-delà des grands groupes, la force de l'économie allemande - nous dit-on - ce sont ses PME. Au plutôt, ses ME car suffisamment grandes pour se battre, et réussir, à l'export. Cela se confirme dans l'Internet, à Cologne.
Dans un domaine qui est cher à Novius, la gestion de contenu web (ce blog est réalisé avec le Content Management System maison, Publi-Nova), une entreprise rhénane de 75 personnes a réussi à se faire une place parmi par les leaders mondiaux. Elle porte le nom évocateur de CM4All, gestion de contenu pour tous. Ils équipent les plus grands hébergeurs et fournisseurs de services Internet de la planète (1&1 encore eux, NTT Verio, Terra Nova, Amen, etc.) de leur système de création de sites web. Il est vendu en marque blanche et s'appelle donc TopSite Express chez l'un et Website Creator chez l'autre. Quel que soit le nom, le principe de ce logiciel est toujours le même : permettre à un novice de se créer un site Internet en deux coups de cuiller à pot et trois clics.

Ce riche tissu économique fait peu à peu converger le centre de la net-économie allemande vers Cologne. C'est en tout cas ce qu'a reconnu l'Association de l'Industrie Internet Allemande (eco) en y établissant ses bureaux.

L'exception numérique allemande

Une auberge de jeunesse à Ljubljana, octobre 2009. Les hôtes défilent aux postes en libre service. Ils viennent des Etats-Unis, de Suisse, du Japon et se rendent pourtant tous sur les deux même sites : Hotmail et Facebook. Arrive un jeune couple allemand. Ils se connectent et se rendent sur... GMX et StudiVZ (le Facebook allemand).

Face à la californication du web, l'Allemagne semble mieux résister. Elle occupe une place à part dans le paysage numérique mondiale. Ici, plus qu'ailleurs, on semble vouloir innover plutôt que d'attendre les dernières trouvailles de la baie de San Francisco.

Ne nous reste plus alors qu'à travailler notre géographie allemande.

2 commentaires
  • Commentaire par Mathias
    Samedi 28 novembre 2009 11:11
    super article ! pour travailler notre géographie, voici deux cartes sur "le réseau des réseaux" en europe : http://bit.ly/8XxE6K et http://bit.ly/6Uzlw4
  • Commentaire par Antoine
    Samedi 28 novembre 2009 13:26
    Salut Mathias, bien content que l'article t'ait plu ! Merci pr les cartes, elles sont super et confirment bien la prédominance de l'Internet rhénan : 50 "bandwidth providers" entre Francfort et Düsseldorf.
Laissez votre commentaire :